Accéder au contenu principal

The dark knight rises (2012) - Christopher Nolan

Cet article contient des spoilers importants

J'étais impatient de voir le nouveau Batman qui clôt la trilogie de Christopher Nolan avec Christian Bale dans le rôle titre. Les bandes annonces étaient prometteuses et les deux films précédents m'avaient beaucoup plu. J'avais donc hâte d'assister à cette conclusion d'autant plus que Batman version "chevalier noir" fait partie de mes personnages préférés.

Je m'imaginais rédiger ma chronique comme j'ai pu le faire pour n'importe quel autre film et notamment comme pour les deux premiers opus, Batman begins et The dark knight mais c'était sans compter avec la tuerie d'Aurora dans l'Etat du Colorado aux Etats-Unis. 12 personnes y ont trouvé la mort, 59 autres y ont été blessées par un homme qui a fait feu sur le public pendant une séance de The dark knight rises. Evénement tragique qui n'a pas tardé à être récupéré par les médias pour nous sortir à nouveau sans aucune gêne le supposé lien qui existerait entre le cinéma et la violence dans nos sociétés avec, cette fois, l'accusation suivante : Le dernier Batman est un film fascisant voire carrément fasciste. Bah voyons, tant qu'à faire dans le racolage actif, autant y aller à fond ! Même Libération et Télérama ont fait leur une sur le sujet mais il faut les comprendre, c'est l'été, il faut motiver les ventes en cette période de l'année où elles ont généralement du mal à décoller.

En plus de unes visuellement laides, les titres des deux publications sont mensongers. "Violent et ambigu" pour Libération, Télérama se demande si Batman n'est pas un assassin. Personnellement, je suis le premier à regretter que The dark knight rises ne soit pas plus violent surtout lors d'un moment particulier, l'affrontement entre la quasi totalité des forces de police de Gotham City et les fous furieux qui composent l'armée de l'ennemi, le terroriste Bane. De manière globale, j'ai trouvé le film un peu trop grand public mais avec les sommes colossales engagées dans sa production et sa promotion, il ne pouvait en être autrement. Quant à "Batman assassin ?", on voit très bien où Télérama veut en venir. Il insinue la possibilité que le film soit à l'origine de faits violents notamment la fusillade d'Aurora. Je suis de ceux qui pensent que si le cinéma peut influencer le comportement du public, ce n'est que sur une très infime partie de celui-ci. Si une production cinématographique, du fait de sa violence, amène quelqu'un à tuer, ce quelqu'un n'a rien à faire dans la cité qui se doit alors de se doter des structures nécessaires pour s'en protéger.

Le titre de Télérama repose donc sur une idée qui est, de mon point de vue, fausse mais qui fait passer Batman pour un héros qui tue facilement. Or, seul Ra's al Ghul, l'ennemi du premier film, meurt du fait de Batman, le héros le laissant délibérément dans le wagon d'un métro qui part se crasher à toute vitesse. Dans le film suivant, le Joker est arrêté tandis qu'Harvey Dent devenu Two-Face meurt dans une chute alors que Batman tente de le retenir. Dans le film qui vient de sortir, Batman empêche Selina Kyle/Catwoman (Anne Hathaway) de tuer de sang froid. C'est d'ailleurs elle qui tuera Bane et non Batman.

A cela s'ajoute le fait que The dark knight rises serait conservateur voire fasciste. Bouh, le vilain ! Quelques clics sur internet suffisent pour trouver un nombre considérable d'articles portant ces accusations en avançant des arguments plus ou moins convaincants. Je pense qu'effectivement, il y a quelque chose d'assez droitier dans ce film mais de là à affirmer que c'est une oeuvre fasciste, il y a là un pas que je ne franchirai pas. Alors oui, on peut y voir une représentation très négative de mouvements tels que Occupy Wall Street ou celui des indignés et en cela il peut paraître réactionnaire mais certainement pas fasciste. The dark knight rises se nourrit des récents mouvements sociaux et contestataires pour développer son intrigue tout comme The dark knight se nourrissait des agissements de l'administration Bush face au terrorisme post 11 septembre. Ce qui me fait rire dans cette polémique, c'est que certains membres du parti républicain et autres conservateurs américains ont accusé le dernier Batman d'être pro démocrate. C'est peut-être dans ces interprétations différentes que Libération y voit de l'ambiguïté.

En ce qui me concerne, je me fiche pas mal qu'une oeuvre cinématographique soit de gauche ou de droite. Par exemple, j'adore les Dirty Harry (série de films évidemment classé à droite, le premier volet s'étant même vu accusé d'être fasciste) avec Clint Eastwood tout comme je suis un admirateur des films d'horreur gauchisants de George A. Romero et John Carpenter. Je n'ai pas la même approche avec la musique. Je ne peux pas saquer Sardou et ses textes bien ancrés à droite par exemple. Au cinéma, j'attache plus d'importance à la mise en scène, au montage, à la façon dont le scénario va chercher l'émotion chez le spectateur. Ainsi, j'ai tendance à laisser de côté le fond même s'il m'arrive parfois d'être offusqué par certaines idées véhiculées par certains films.



Donc, qu'en est-il de The dark knight rises ? Quand est arrivé le générique de fin, une expression m'a immédiatement traversé l'esprit : "Putain de film !". En lisant les critiques, on peut se rendre compte que ce dernier opus a un peu déçu, la grande majorité préférant le 2ème volet, ce qui n'est pas mon cas. Les déçus regrettent surtout l'absence du Joker estimant que Bane, interprété par Tom Hardy, n'atteint pas le charisme du précédent méchant. Je ne suis pas de cet avis ; Bane est un ennemi dont les agissements reposent sur d'autres ressorts physiques et psychologiques mais qui n'en sont pas moins intéressants. Que ceux qui doutent de la performance de l'acteur et de l'efficacité du personnage revoient la version débile et bouffonne qui en avait été livrée par Joel Schumacher dans Batman et Robin en 1997.

Le film répond aussi à une logique de faire encore plus impressionnant. On a fait exploser un hôpital entier dans The dark knight ? Faisons exploser des centaines de bâtiments dans The dark knight rises ! Trop souvent, ce genre de logique scénaristique accouche de films boursouflés où la surenchère finit par lasser comme un gâteau trop plein de crème parvient à nous en dégoûter. Ce n'est pas le cas ici. Le chaos est impressionnant, inquiétant jusqu'à en être par moment terrifiant et on en vient à se demander si Batman va réussir à sauver Gotham City et même si le héros lui-même s'en sortira vivant.



Même si c'est le chaos et malgré quelques raccourcis, le scénario comme la mise en scène sont d'une précision qui forcent l'admiration, certains passages renvoyant à certaines paroles, certains actes ayant des conséquences sur d'autres moments et le lien est également établi avec les films précédents : La mémoire de Harvey Dent est entretenue. On retrouve le psychologue Jonathan Crane alias l'épouvantail (toujours interprété par Cillian Murphy) qui semble avoir définitivement sombré dans la folie et qui est désormais le juge suprême du régime qu'a installé Bane à Gotham. A ce titre, dans la parodie de justice qu'il administre (certains y voient certainement une allusion à la justice de l'ex Union Soviétique) il ne connait que deux verdicts : l'exil ou la mort. Quand on sait que l'exil ne conduit qu'à la mort...

Christopher Nolan a réalisé le meilleur film de sa trilogie Batman et surtout le meilleur film sur le dark knight. Mon seul regret est de le voir répéter qu'il en a désormais fini avec ce personnage tout comme Christian Bale. Pourtant, la fin est on ne peut plus ouverte et assure la relève.

Putain de film !


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Vertige (2011) - Franck Thilliez

J'ai découvert Franck Thilliez  il y a quelques années avec La chambre des morts , polar que j'avais apprécié lire. Plus tard, j'ai lu Train d'enfer pour ange rouge , thriller plutôt bien construit qui plonge le lecteur dans un univers qui se montre de plus en plus effrayant. J'ai achevé la lecture de  Vertige  récemment, son avant dernier livre qui me fait dire que l'auteur s'est amélioré entre ses premières œuvres et celle-ci ; Avec toujours ce goût pour les descriptions de scènes et situations morbides. Jonathan Touvier se réveille au fond d'une grotte glacée. Il est attaché au poignet par une chaîne qui restreint considérablement son champs de déplacement. Il y a son chien aussi, endormi et qui ne tardera pas à sortir du sommeil dans lequel il a été plongé. Deux autres hommes aussi se réveillent dans le même lieu : Farid, qui lui est enchaîné à la cheville et Michel, libre de ses mouvements mais qui a un masque de fer fixé autour de la tête. P

Licence to kill (1989) - John Glen

Licence to kill est le premier James Bond que j'ai vu au cinéma. A l'époque, j'avais été un peu déçu, le canevas scénaristique étant similaire à de nombreuses productions cinématographiques des années quatre-vingts, à savoir une histoire de vengeance sur fond de trafic de drogue. Depuis, je l'ai revu à la hausse. En effet, bien qu'il s'agisse pour la première fois d'un titre non issu des écrits de Ian Fleming, il me semble plutôt fidèle à l'esprit du créateur de James Bond. Il s'inspire d'ailleurs d'éléments qui avaient été ignorés dans les précédentes adaptations, en premier lieu la mutilation de Felix Leiter ( David Hedison ), jeté dans la mâchoire d'un requin, événement dramatique qui intervient dans le roman Live and let die mais entièrement ignoré dans sa pitoyable adaptation de 1973 . Dans Licence to kill , Leiter est jeté au requin alors qu'il vient tout juste de se marier. Parallèlement, Della, son épouse, sera t

Casino Royale (1953) - Ian Fleming

Avant propos : la quasi intégralité de cet article a été rédigée avant le week-end James Bond au Touquet . C'est l'organisation de ce week-end qui m'a motivé pour me plonger à nouveau dans les origines de 007 plus de 20 ans après les avoir lu. Il y a quelques similitudes avec les propos de Jacques Layani lors de sa conférence du 8 octobre dernier mais en aucune façon, je n'ai copié ou récupéré ce qu'il a pu dire sur Ian Fleming et James Bond. Je tenais à le préciser afin d'éviter tout malentendu avec celles et ceux qui ont assisté à la conférence ainsi qu'avec Jacques Layani lui même. " L'odeur d'un casino, mélange de fumée et de sueur, devient nauséabonde à trois heures du matin. L'usure nerveuse causée par le jeu - complexe de rapacité, de peur et de tension - devient insupportable ; les sens se réveillent et se révoltent. " C'est par ces mots que commence en 1953 la toute première intrigue de James Bond 007 imaginée par