Accéder au contenu principal

Seul à savoir (2010) - Patrick Bauwen

"Le plaisir d'être surpris.
Voilà l'émotion essentielle.
Marion  était assise sur le toit de l'Hôtel-Dieu, l'un des plus anciens hôpitaux de Paris. Il faisait un peu froid, et elle regardait la neige tomber sur la capitale.
En bas, les lumières de Noël brillaient sur le tapis blanchâtre qui recouvrait le parvis de la cathédrale Notre-Dame. Il était quatre heures du matin et seules quelques voitures circulaient encore. De rares passants rentraient chez eux, solitaires. Les bruits atténués semblaient étouffés par du coton. Marion contemplait la scène en essayant de capturer chaque son, chaque détail,la moindre texture, jusqu'au goût de la neige sur la langue. Elle hésitait presque à battre des paupières de peur de perturber cet instant fragile. Elle n'avait que vingt ans, mais elle savait déjà que ce genre de moment était le fruit d'une alchimie unique, et qu'il ne se reproduirait plus. Alors, elle essayait d'en profiter encore un peu."

Au début de la lecture d'un livre dont je ne sais rien de l'auteur, il y a toujours cette crainte d'être déçu. Cela est d'autant plus vrai en matière de thrillers qu'il m'arrive de me dire que dans le genre, tout a été dit, tout a été écrit.

Ce qui distingue Patrick Bauwen des autres est qu'il est médecin urgentiste. De ce fait, ce qu'il rédige autour du domaine hospitalier et médical possède le goût de la vérité. C'est assez flagrant au sujet des salles de garde des hôpitaux, à propos des fresques qui habillent leurs murs et des rituels et des coutumes qui les entourent. J'ignorais tout de ces lieux jusqu'à ce que je lise un article de presse leur étant consacré, il y a plusieurs années déjà, et dont une description vivante est relatée dans Seul à savoir.

Marion, assistante d'une productrice d'une chaîne de télévision, est contactée par un inconnu sur Facebook. Ignorant le message, elle reçoit le lendemain un e-mail de la même personne, sur sa boite professionnelle. En pièce jointe, une photo de Nathan, son amour disparu sans laisser de trace du jour au lendemain, plus de dix ans auparavant.

Il s'agit donc d'une trame assez classique, celle d'un mystère du passé qui ressurgit alors que l'individu qui en avait été confronté le croyait enfoui à jamais. Seul à savoir n'est pas déplaisant à la lecture et tient les promesses que le lecteur est en droit d'attendre avec ce genre de littérature. Le suspense est bon, certaines situations sont plutôt haletantes et Marion, qui est sous l'emprise et la manipulation d'un personnage insaisissable, "le troyen", est assez attachante de par sa vulnérabilité comme de sa volonté.

Comme dans tous romans de ce type, il y a les habituels raccourcis. Tout dépend ensuite de la tolérance du lecteur à les accepter ou non. Me concernant, je suis plutôt tolérant à ce sujet, tant qu'ils ne sont pas trop gros. Ceux que l'on peut rencontrer avec Seul à savoir ne m'ont pas posé trop de problème mais, sans révéler le fond de l'intrigue, le personnage de Nathan fait une chose tellement hallucinante que je me suis demandé comment il pouvait prétendre être si amoureux de Marion et surtout comment, elle, pouvait continuer ensuite à lui manifester le même amour. Il y a là quelque chose qui me dépasse. Bref, dans les dernières pages, le Nathan me paraissait parfaitement infréquentable et odieux.

C'est un peu dommage que le personnage qui est le moteur principal de l'enquête paraisse, dans les derniers chapitres, nettement moins sympathique que ce qu'il semblait être et surtout assez incompréhensible que son amour reste toujours aussi fort après ce qu'il a fait.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Vertige (2011) - Franck Thilliez

J'ai découvert Franck Thilliez  il y a quelques années avec La chambre des morts , polar que j'avais apprécié lire. Plus tard, j'ai lu Train d'enfer pour ange rouge , thriller plutôt bien construit qui plonge le lecteur dans un univers qui se montre de plus en plus effrayant. J'ai achevé la lecture de  Vertige  récemment, son avant dernier livre qui me fait dire que l'auteur s'est amélioré entre ses premières œuvres et celle-ci ; Avec toujours ce goût pour les descriptions de scènes et situations morbides. Jonathan Touvier se réveille au fond d'une grotte glacée. Il est attaché au poignet par une chaîne qui restreint considérablement son champs de déplacement. Il y a son chien aussi, endormi et qui ne tardera pas à sortir du sommeil dans lequel il a été plongé. Deux autres hommes aussi se réveillent dans le même lieu : Farid, qui lui est enchaîné à la cheville et Michel, libre de ses mouvements mais qui a un masque de fer fixé autour de la tête. P

Licence to kill (1989) - John Glen

Licence to kill est le premier James Bond que j'ai vu au cinéma. A l'époque, j'avais été un peu déçu, le canevas scénaristique étant similaire à de nombreuses productions cinématographiques des années quatre-vingts, à savoir une histoire de vengeance sur fond de trafic de drogue. Depuis, je l'ai revu à la hausse. En effet, bien qu'il s'agisse pour la première fois d'un titre non issu des écrits de Ian Fleming, il me semble plutôt fidèle à l'esprit du créateur de James Bond. Il s'inspire d'ailleurs d'éléments qui avaient été ignorés dans les précédentes adaptations, en premier lieu la mutilation de Felix Leiter ( David Hedison ), jeté dans la mâchoire d'un requin, événement dramatique qui intervient dans le roman Live and let die mais entièrement ignoré dans sa pitoyable adaptation de 1973 . Dans Licence to kill , Leiter est jeté au requin alors qu'il vient tout juste de se marier. Parallèlement, Della, son épouse, sera t

Casino Royale (1953) - Ian Fleming

Avant propos : la quasi intégralité de cet article a été rédigée avant le week-end James Bond au Touquet . C'est l'organisation de ce week-end qui m'a motivé pour me plonger à nouveau dans les origines de 007 plus de 20 ans après les avoir lu. Il y a quelques similitudes avec les propos de Jacques Layani lors de sa conférence du 8 octobre dernier mais en aucune façon, je n'ai copié ou récupéré ce qu'il a pu dire sur Ian Fleming et James Bond. Je tenais à le préciser afin d'éviter tout malentendu avec celles et ceux qui ont assisté à la conférence ainsi qu'avec Jacques Layani lui même. " L'odeur d'un casino, mélange de fumée et de sueur, devient nauséabonde à trois heures du matin. L'usure nerveuse causée par le jeu - complexe de rapacité, de peur et de tension - devient insupportable ; les sens se réveillent et se révoltent. " C'est par ces mots que commence en 1953 la toute première intrigue de James Bond 007 imaginée par