Accéder au contenu principal

Per un pugno di dollari (1964) - Sergio Leone

 
Je me souviens très bien en quelle l'année j'ai vu pour la première fois Per un pugno di dollari. C'était en 1986 et mes parents l'avaient loué à mon intention. C'était cette époque de l'essor des vidéo-clubs où vous trouviez aussi bien les dernières sorties que d'anciens films de tous genres. C'est par le biais des locations de cassettes VHS quasi hebdomadaires que fut forgée ma culture cinématographique.

En découvrant le premier western de Sergio Leone, je sentais bien qu'il sortait de l'ordinaire mais à cet âge là, il est plutôt difficile d'exprimer ce genre de ressenti. On aime, on aime un peu ou on n'aime pas. J'avais carrément adoré. En un seul film et à même pas douze ans, je découvrais le western italien, Clint Eastwood et Sergio Leone. Sans que je ne m'en sois vraiment rendu compte, voilà trente ans que tout cela m'accompagne. Depuis ce film, j'ai un goût prononcé pour les westerns italiens (cf. mes billets sur Django et Il grande silenzio), j'admire le travail de Clint Eastwood, aussi bien l'acteur que le metteur en scène et Sergio Leone est mon metteur en scène préféré depuis longtemps.

Jusqu'à encore récemment, la critique et beaucoup de gens ont méprisé les westerns italiens. D'ailleurs, l'appellation répandue de "western spaghetti" témoigne de cette inconsidération et adolescent, il est arrivé qu'on me regarde avec un étonnement dédaigneux lorsque j'affirmais que j'adorais ce film comme d'autres provenant du même pays.


Per un pugno di dollari n'est cependant pas sans défaut. J'ai toujours eu du mal à cerner les réelles motivations du personnage de Clint Eastwood. Est-il épris de justice pour cette femme retenue par le clan des Rojo ? A t-il un compte à régler avec l'une des familles qui sème la terreur dans cette petite ville perdue où il débarque au début ? En fait, je crois qu'il ne faut pas chercher bien loin, la réponse est déjà dans le titre. Ses motivations sont strictement rémunératrices.

Il est possible également de sentir quelque frustration dans la mise en scène, frustration certainement due au faible budget et qui empêche Sergio Leone d'exprimer le lyrisme dont il pourra faire preuve par la suite. A la bande originale, le génial Ennio Morricone est déjà là, et même si, sûrement là aussi pour une question financière, il ne dispose pas de tous les moyens pour exprimer l'ensemble de son talent, sa musique se remarque, se distingue et appuie indéniablement les images.

Je regrette aussi que lors du massacre des mexicains par une mitrailleuse tenue par Ramon Rojo (Gian Maria Volontè), il n'y ait aucune effusion de sang. Il ne s'agit pas d'exprimer un goût morbide pour les effusions ensanglantées (un peu quand même) mais la scène étant assez longue, elle manque finalement d'impact.


Ces objections mises à part, Per un pugno di dollari demeure un très bon western qui se suit sans ennui aucun et reste une référence dans son genre. Et déjà, Sergio Leone fait preuve d'originalité dans sa conception des duels entre cowboys. Ici, révolver contre fusil dans les dernières minutes avec un postulat posé plus tôt par l'ennemi qui manipule le fusil : "Quand un homme avec un 45 affronte un homme avec un fusil, celui qui a le pistolet est un homme mort". Et bien sûr, c'est Clint Eastwood, le "gentil", qui porte le 45 à la ceinture, c'est-à-dire celui qui est sensé se faire tuer.

La vision du monde de Sergio Leone apparait également plus positive que celle de Sergio Corbucci, l'autre maître du western italien. Malgré les arrière-pensées pécuniaires du personnage principal, on peut estimer à la fin que le bien a triomphé. Le village est débarrassé des deux terribles familles, Marisol, la femme retenue prisonnière par les Rojo, au grand désespoir de son mari et de leur fils, est libre, aucun personnage "positif" n'est mort et l'homme sans nom quitte le village vivant après y avoir installé la paix.

Sur la page Wikipédia du film, sont rapportées des critiques d'époque. Pour Les cahiers du cinéma, c'est "nettement supérieur à tous les autres westerns européens, ce qui ne signifie pas, tant s'en faut, que cela présente le moindre intérêt" et pour L'Humanité, "ce n'est pas du cinéma, mais de la pacotille, mais ça brille, brille, brille". Quel manque de perspicacité ! Ce qui me fait sourire, est que ces revues et ces journaux réviseront leur jugement, l'air de rien plus tard, ni vu ni connu.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Vertige (2011) - Franck Thilliez

J'ai découvert Franck Thilliez  il y a quelques années avec La chambre des morts , polar que j'avais apprécié lire. Plus tard, j'ai lu Train d'enfer pour ange rouge , thriller plutôt bien construit qui plonge le lecteur dans un univers qui se montre de plus en plus effrayant. J'ai achevé la lecture de  Vertige  récemment, son avant dernier livre qui me fait dire que l'auteur s'est amélioré entre ses premières œuvres et celle-ci ; Avec toujours ce goût pour les descriptions de scènes et situations morbides. Jonathan Touvier se réveille au fond d'une grotte glacée. Il est attaché au poignet par une chaîne qui restreint considérablement son champs de déplacement. Il y a son chien aussi, endormi et qui ne tardera pas à sortir du sommeil dans lequel il a été plongé. Deux autres hommes aussi se réveillent dans le même lieu : Farid, qui lui est enchaîné à la cheville et Michel, libre de ses mouvements mais qui a un masque de fer fixé autour de la tête. P...

La maison de Gaspard ferme ses portes

Je me souviens parfaitement de la première fois que j'ai vu Gaspard. Il jouait dans un box avec son frère chez l'éleveur où je m'étais rendu avec l'intention d'acquérir un chien. En entrant dans le hangar où se trouvaient les box, il a arrêté de jouer et s'est assis devant la porte grillagée en me regardant. J'ai su immédiatement que je repartirais avec lui. Il avait trois mois et demi. Chiot, il a fait quelques conneries. Il a bouffé un mur, déchiqueté un livre mais ce n'est rien par rapport à la joie qu'il a apporté pendant toutes ces années. A de nombreuses reprises, il m'a accompagné en randonnée en montagne dans les Alpes et dans les Pyrénées. Il restait toujours à vue d’œil et attendait assis quand il ne me voyait plus. Un jour, dans la résidence où j'habitais et alors que je revenais de balade avec lui, un rottweiler a foncé sur moi. Gaspard n'a pas hésité à se placer devant moi et à se battre frontalement avec ce chien ; ...

Shaken and stirred : The David Arnold James Bond project (1997) - David Arnold

Le titre de l'album est un clin d’œil à "Shaken not stirred", la formule de James Bond à chaque commande de Vodka Martini. Les thèmes bondiens sont passés à la moulinette sous la direction du compositeur David Arnold. Celui-ci a confectionné les bandes originales de  Tomorrow never dies , The world is not enough , Die another day et Casino Royale . Il a apporté à ces films un son électronique moderne et dynamique pour revenir à une partition plus classique sur le dernier, changement d'acteur et de direction. Shaken and stirred : The David Arnold James Bond project est un album conceptuel de reprises de titres bondiens avec des artistes de musique rock et électronique. Un très bon disque en phase avec son époque et ce qu'il se faisait il y a vingt ans. Aujourd'hui, il est encore parfaitement écoutable et bouillonne toujours d'énergie. Son point fort est toujours, à mon avis, la revisite de On her Majesty's secret service de Propellerhe...